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Déserts médicaux : réalité versus fantasme ?
On a rencontré des déserts médicaux…
Certains nient l’existence de déserts médicaux. Au motif qu’avant les recrutements massifs opérés dans les années sans numerus clausus, les médecins sont allés s’installer dans des endroits où l’on n’en avait jamais vu. Certes. L’électricité et l’eau courante faisaient aussi défaut dans de nombreuses villes et campagnes au début du XXème siècle !
Il y a donc bien aujourd’hui des déserts médicaux, y compris en ville. Car un désert médical n’est ni un territoire dépeuplé, ni forcément un territoire enclavé, péri-urbain, ou délaissé par les services publics. Un désert médical est un territoire habité par une population qui peine à accéder aux soins médicaux comparativement à la moyenne nationale. Et dans les déserts médicaux, il y a donc bien des vrais gens, comme ceux qui ont répondu au sondage effectué par BVA pour le compte du Collectif interassociatif sur la santé. Ce sondage identifie bien les difficultés de nos concitoyens, les responsabilités et les solutions à mettre en œuvre.
Recherche médecin désespérément
Les délais d’attente sont la difficulté la plus fréquente : 63% des Français déclarent en effet avoir déjà été au moins une fois dans l’impossibilité de consulter un médecin (généraliste et / ou spécialiste) dans un délai raisonnable. Plus précisément : près de 30 % des Français ont déjà été dans l’impossibilité d’obtenir un rendez-vous chez un généraliste, et ce chiffre grimpe à 55% concernant la consultation d’un spécialiste. Et nombre de nos concitoyens ne trouvent plus de médecin acceptant de devenir leur « médecin traitant ».
La faute à la mauvaise répartition
Ces difficultés d’accès à la consultation médicale sont largement liées à la densité des médecins dans les territoires et les Français en sont majoritairement conscients : ils sont 60 % à considérer que le manque de médecins dans certains territoires résulte avant tout de leur mauvaise répartition.
« Contre les déserts médicaux, on a tout essayé » ? Non !
Classiquement, des politiques incitatives ont été mises en place. Depuis 2007, divers dispositifs, renforcés en 2011, ont été déployés. Avec notamment, la création de l’option D (pour « démographie ») financée par l’Assurance maladie. Le médecin adhérent s’engage alors à s’installer ou à rester installé dans la zone ou à proximité pour une durée de 3 ans et à contribuer à la continuité et à la permanence des soins. En contrepartie de son engagement, le médecin bénéficie de deux aides : une aide forfaitaire à l’investissement (5 000 € /an pour les médecins exerçant en groupe et 2 500 €/an pour les médecins membres d’un pôle de santé) et une aide à l’activité (pouvant aller jusqu’à 20 000 €/an pour des médecins exerçant en groupe).
Ces solutions n’ont pas permis de changer la donne. D’ailleurs, dès 2013, un rapport d’information du Sénat le reconnait. Il s’intitule : « Déserts médicaux : agir vraiment ». C’est tout dire !
Les Français sondés par BVA partagent l’analyse des Sénateurs. Ils sont 7 sur 10 à considérer à la fois que les règles de répartition des médecins sur le territoire ne prennent pas assez en compte les besoins des patients, mais aussi que les pouvoirs publics devraient intervenir pour réguler cette répartition.
Ainsi, ils sont seulement 38 % à considérer qu’il faut accorder plus d’avantages aux médecins prêts à exercer dans des déserts médicaux contre 55% à plébisciter des mesures d’encadrement de l’installation : 29 % en limitant l’installation des médecins dans les zones où ils sont déjà en nombre suffisant, et 26 % en obligeant des médecins à s’installer dans les zones où ils sont en nombre insuffisant.
Encadrer l’installation, une nécessité maintenant
Contrairement à ce qui existe pour d’autres professions libérales de santé, il n’existe aucun dispositif qui tente de réguler l’installation des médecins par des critères d’encadrement tenant compte du rapport entre la densité médicale et la densité de population dans les territoires.
Pourtant, des dispositifs de ce type sont appliqués à d’autres professions de santé. Pour les infirmiers, dans le cadre d’un conventionnement avec l’Assurance maladie qui prévoit notamment qu’un infirmier envisageant de s’installer en exercice libéral dans une zone « sur dotée » ne le peut que si un infirmier libéral cesse son activité dans cette même zone. Pour les pharmaciens, l’installation d’une nouvelle officine dans un territoire est conditionnée à une autorisation administrative délivrée par l’Agence régionale de Santé en fonction du nombre d’habitants.
Comment lutter contre les déserts médicaux ?
- En décidant que les besoins en ouverture de cabinet médicaux figurent dans une « carte sanitaire » opposable et en soumettant les médecins à une demande d’autorisation administrative en vue de leur installation.
- En prévoyant que la prochaine convention médicale contienne des mécanismes de désincitation dans les zones sur-denses.
- En limitant les dépassements d’honoraires dans les zones sur-médicalisées au regard de la carte sanitaire pour éviter que la moindre activité ne soit compensée par l’augmentation des honoraires.
- En augmentant la rémunération forfaitaire des médecins qui acceptent de s’installer dans les déserts médicaux.
- En encourageant le transfert de certains actes médicaux vers des professionnels de santé non médecins formés à ces actes.
Nous cotisons tous à l’Assurance maladie, en regard de cet effort financier il est légitime de trouver le retour de cette cotisation : la possibilité d’accéder aux soins.
« Le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en œuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne » . C’est ainsi qu’est rédigé le code de la santé publique, inspiré par la Constitution dont le préambule déclare que la Nation « garantit à tous, la protection de la santé » . Nos lois permettent donc la mise en œuvre des solutions que nous prônons et dont notre sondage atteste qu’elles sont légitimes et souhaitées par les Français.